Publié le : mardi 5 juin 2018

Procès de Mélina Boughedir : la France a-t-elle influencé la décision ?

Le procès en appel de la française Mélina Boughedir, partie en Irak aux cotés de son mari et accusée d’appartenance au groupe Etat Islamique, s’est achevé par sa condamnation à la prison à perpétuité. Ses avocats dénoncent une ingérence du ministre des Affaires Etrangères pour forcer cette décision.

La situation des djihadistes français partis rejoindre Daech et, plus encore, celle de leurs épouses, reste une épine dans le pied de la diplomatie française. Ces femmes, arrêtées en Syrie ou en Irak, réclament pour la plupart à être jugées en France. Mais les autorités ne semblent pas partager ce point de vue.

Le cas de Mélina Boughedir est emblématique de cette situation : cette femme a été capturée le 8 juillet à Mossoul par les force irakiennes avec ses quatre enfants mineurs – dont trois ont déjà été rapatriés en France. Elle clame avoir été dupée par son mari et n’avoir jamais fait parti de l’organisation Etat Islamique.

Un premier procès, en février, s’est d’ailleurs contenté de la condamner à 7 mois de prison pour entrée illégale sur le territoire irakien, sans aucune charge liée au terrorisme. Mais, lors de l’appel, automatique dans ce cas, ces charges ont été requalifiées en appartenance à Daech. Au terme d’un second procès, ce dimanche 3 juin, elle a été condamnée à la prison à perpétuité – elle risquait la peine capitale.

Ses avocats dénoncent une déclaration du ministre français des Affaires Etrangères, Jean-Yves Le Drihan, qui a qualifié Mélina Boughedir de « combattante », quelques jours avant la tenue du procès.

« Les déclarations du ministre Le Drihan ont été perçues comme un encouragement puissant à la fermeté »

« On peut dire que le message de Jean-Yves Le Drihan a été reçu cinq sur cinq à Bagdad. D’autre part, il y a un sous-jacent politique, qui est l’intensité des relations bilatérales entre la France et l’Irak, sur le plan militaire et politique. Les déclarations du ministre Le Drihan ont été perçues comme un encouragement puissant à la fermeté et personne ne peut douter que cette peine précipitée ne soit en lien avec la volonté de la France qu’elle ne rentre pas » a déclaré l’avocat de la jeune femme.

Mélina Boughedir va faire appel de la décision, tout en continuant à demander aux autorités françaises de faire pression sur l’Irak pour qu’elle puisse être jugée en France. La jeune femme est en effet visée par un mandat de recherche délivré dans le cadre d’une information judiciaire ouverte à Paris le 2 août 2016, pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle ».

Mais l’Irak n’est pas tenu de se conformer à ce mandat d’arrêt. « La justice irakienne est légitime à juger, elle a pris sa décision », a déclaré Christophe Castaner, le secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement – comme une confirmation que les autorités françaises ne souhaitent que modérément son retour en France…

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