Arménie : récit d’une révolution de velours
Mi-avril, l’élection de Serge Sarkissian au poste de premier ministre de l’Arménie déclenchait une contestation populaire d’envergure, qui a fini par aboutir à sa démission et à la nomination à son poste, en deux temps, de son principal opposant Nikol Pachiniyan.
L’opposition estimait que le changement de Constitution de l’Arménie, accordant l’ensemble des pouvoirs exécutifs au premier ministre, avait pour seul but de maintenir Serge Sarkissian au pouvoir, au terme de ses deux mandats de président de la République.
Et si M. Sarkissian, pro-russe, a bien été élu premier ministre, le 17 avril, au terme d’élections à la validité contestée, la réaction populaire ne s’est pas fait attendre. Menée par l’opposant Nikol Pachiniyan, une vague de manifestations et d’actes de désobéissance civile ont paralysé le pays.
Les deux opposants se rencontrent le 22 avril sur fonds de tension populaire. Si Serge Sarkissian entend conserver le pouvoir, le discours de M. Pachinyian est offensif : « Je suis venu ici pour discuter des termes de votre démission et des conditions d’une transition pacifique et sans heurt du pouvoir. […] Je vous le dis : vous ne comprenez pas la situation qui règne dans le pays. Elle est différente de celle que vous connaissiez il y a quinze ou vingt jours. Le pouvoir est passé aux mains du peuple ».
Et si, au terme de cette entrevue, l’opposant est interpellé par la police avec 200 manifestants, le lendemain, 23 avril, deux cents militaires se joignent aux manifestants. Dans la soirée, M. Sarkissian, sentant que le vent a tourné et que l’armée risque de le lâcher, annonce sa démission : « Nikol Pachiniyan avait raison. Et moi, je me suis trompé » admet l’ancien président.
Un « tsunami politique » pour forcer la main au Parlement
Le 1er mai, nouveau coup de théâtre : la candidature de M. Pachiniyan au poste de premier ministre est rejetée par le Parlement, provoquant un blocage de tout le pays, routes, trains, aéroports, administrations. La démonstration de force de ce « tsunami politique » provoque une prise de conscience des parlementaires : quatre groupes s’accordent pour soutenir sa candidature au poste de premier ministre.
Le 8 mai, Nikol Pachinyian est ainsi élu premier ministre, au terme d’une révolution de velours qui n’a fait aucune victime. Des législatives anticipées vont être organisées, que l’ancien journaliste devrait remporter.
Une page se tourne pour l’Arménie. Les menaces à peine voilée de la Russie annoncent que la petite république devra se trouver rapidement de nouveaux alliés. Mais la ferveur et la joie populaires rendent, pour l’heure, les Arméniens optimistes sur leur avenir.