Publié le : mercredi 21 décembre 2016

Monténégro : l’intégration à l’OTAN fait débat

14490453154440En préparation depuis plus d’un an, l’adhésion du Monténégro à l’OTAN suscite de nombreuses interrogations. En cause, les accusations de corruption et de manquements à la démocratie qui pèsent toujours sur le gouvernement monténégrin.

Depuis le 19 mai 2016, le Monténégro est officiellement autorisé à assister aux réunions de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) en tant que « pays invité ». A la suite de la signature du protocole d’accession, la jeune république d’ex-Yougoslavie attend maintenant la ratification de son intégration par les 28 pays-membres de l’Alliance. Son Premier ministre, Milo Djukanovic, a déclaré en octobre que l’entrée du Monténégro dans l’OTAN était « assurée […] dans quelques mois seulement », promettant également de finaliser les négociations avec l’Union européenne.

Née en 1949 peu après la fin de la Seconde guerre mondiale, l’OTAN constitue une union symbolique et non moins influente des principaux pays occidentaux. Depuis la dislocation du bloc soviétique, l’organisation s’est progressivement ouverte aux pays d’Europe de l’est comme la Pologne, la Hongrie et la République Tchèque en 1999, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Bulgarie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie en 2004 ainsi que la Croatie et l’Albanie en 2009. Tandis que l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie ont vu leur demande déclinée en 2008, le Monténégro semble en bonne position pour devenir le 29e membre de l’OTAN, notamment grâce à sa contribution à la mission de l’Alliance en Afghanistan entre 2010 et 2014. Pourtant, le pays dirigé depuis 25 ans par Milo Djukanovic présenterait encore de sérieux obstacles en termes de démocratie, de transparence et de liberté d’expression, selon la presse internationale.

Les résultats contestés des dernières élections

Le 16 octobre 2016, le scrutin des élections législatives monténégrines aurait ainsi été « marqué par les irrégularités », selon l’agence Reuters. Sorti vainqueur avec 36 sièges parlementaires sur 81, le Parti des démocrates socialistes (DPS) dirigé par Milo Djukanovic a été accusé de menaces sur les votants, de corruption massive d’électeurs et d’agressions physiques sur plusieurs membres de l’opposition. Dans son rapport, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a d’ailleurs souligné que « les médias ont manqué d’indépendance éditoriale dans une campagne marquée par les attaques personnelles », en référence à la fermeture de plusieurs sites d’information et de partis politiques le jour du suffrage, ainsi que la suspension des principaux services de messagerie instantanée comme Whatsapp et Viber pendant une grande partie de la journée.

Dénonçant les résultats du vote, les 39 députés élus représentant l’opposition n’ont à ce jour pas officiellement débuté leur mandat. À l’image de Dritan Abazovic, ces derniers jugent illégitime la constitution du nouveau parlement et la formation d’un gouvernement, qui ne peuvent être actées sans leur accord. Les accusations d’atteinte à la démocratie ne semblent surprendre personne au Monténégro, tout comme celle de corruption. Le pays des Balkans est soupçonné d’être « redevenu une plaque tournante du trafic de cigarettes », ainsi que l’affirme une enquête publiée par l’hebdomadaire allemand Die Zeit. Comme dans les années 90, le Monténégro verrait de nouveau transiter « des milliards de cigarettes à destination du marché noir européen ». Mais aujourd’hui, la contrebande de cigarettes serait d’autant plus inquiétante qu’elle alimenterait directement les caisses des réseaux terroristes Al-Qaïda et Daech, comme le révèle une enquête menée par trois journalistes balkaniques.

Accusations de corruption et autocensure de la presse

Le trafic de cigarettes a déjà valu à Milo Djukanovic de faire l’objet d’un mandat d’arrêt en Italie, auquel le Premier ministre a pu échapper grâce à son immunité diplomatique. Alors que cette dernière vient d’être levée, la justice italienne considérerait à présent une reprise des poursuites. À l’époque, les investigations sur l’implication du Premier ministre et ancien président monténégrin avaient notamment été marquées par l’assassinat en 2000 de l’opposant Pavle Bulatovic, qui l’avait confronté publiquement sur le sujet, et en 2004 du rédacteur en chef du quotidien Dan, Dusko Jovanovic, qui enquêtait sur l’affaire.

Les accusations de corruption du gouvernement et d’oppression des minorités serbes sont fréquentes dans la presse étrangère, mais quasiment absentes des journaux nationaux. Le Monténégro n’est en effet que 106e sur 180 au classement de la liberté de la presse 2016 publié par Reporters sans frontières. « La profession est réduite à l’autocensure », résume l’organisation sur son site, « car les journalistes sont régulièrement la cible de violentes attaques, verbales et physique, et les coupables bénéficient d’une impunité quasi-systématique ».

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