Bruxelles souhaite adapter le réseau électrique européen aux nouveaux enjeux énergétiques
Dominique Ristori, directeur général Energie à la Commission européenne, a annoncé vendredi 13 mai dernier à Strasbourg, lors d’un colloque consacré à la coopération énergétique entre la France et l’Allemagne, que Bruxelles présenterait avant la fin de l’année une série de propositions pour un « nouveau marché » de l’électricité. Le but : adapter les réseaux au développement des énergies renouvelables et à la révolution numérique.
Pour M. Ristori, une nouvelle stratégie en matière de développement et gestion de réseaux électriques intelligents doit s’imposer en Europe. Celle-ci s’est en effet engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici à 2030 – par rapport à 1990 –, tout en atteignant 20 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables d’ici 2020. Or, si la coexistence des stratégies nationales était jusqu’ici la norme, l’ère du numérique suppose – et peut faciliter – une coopération accrue entre les Etats et les grandes régions du continent.
Des « smart grids » européens
Le développement des énergies intermittentes, comme l’éolien et le photovoltaïque, impliquent une multiplication des sources à introduire sur le réseau, ainsi qu’une plus grande difficulté à prévoir la puissance disponible à un moment donné. La nouvelle stratégie européenne devra dès lors être en capacité de « réconcilier des montants accrus d’énergie variable, notamment renouvelable, avec la sécurité de fonctionnement de l’ensemble du système énergétique », comme l’expliquait Dominique Ristori à Strasbourg.
Afin de répondre à ces nouveaux défis, le renforcement des interconnexions entre pays européens est indispensable, tout comme l’avènement des « réseaux intelligents » (capables de s’adapter en fonction de l’offre et la demande) et le développement des capacités de stockage. En permettant la collecte et la distribution d’énergie de manière maîtrisée, fiable et sécurisée, ces réseaux intelligents (« smart grids » en anglais) permettent d’ajuster les flux d’électricité entre fournisseurs et consommateurs.
Ils permettent ainsi de synchroniser automatiquement des consommations souples avec la production d’énergies renouvelables intermittentes. L’implication du consommateur dans la maîtrise de sa demande en électricité est ainsi facilitée et le fonctionnement du réseau rendu plus transparent pour les parties prenantes – ce qui explique le succès grandissant des réseaux intelligents dans le monde. Selon une étude publiée récemment par Northeast Group, LLC, les réseaux intelligents peuvent apporter des avantages significatifs aux pays développés par le biais de programmes de réponse à la demande, tandis que les pays à faible revenu ont la possibilité de bénéficier des compteurs intelligents pour réduire des taux de pertes non-techniques.
« Nombreux avantages pour les consommateurs »
Dans ce contexte, les propositions pour un « nouveau marché » que la Commission européenne présentera avant la fin de l’année sont attendues avec impatience. Elles devront compléter les mesures prises jusqu’ici, en particulier l’objectif de pénétration de 80 % de compteurs intelligents à l’horizon 2020. Egalement appelés « compteurs communicants », ces outils constituent la première étape dans la mise en place des réseaux intelligents et sont donc naturellement appelés à jouer un rôle-clé dans les années à venir.
En France, le compteur communicant et télé-opérable Linky est installé au sein des foyers depuis le 1er décembre 2015. Comme l’a confirmé en mars dernier la Commission de régulation de l’énergie (CRE), le compteur intelligent d’Enedis (ex-ERDF) présente « de nombreux avantages aussi bien pour la filiale d’EDF que pour les consommateurs ». La possibilité d’effectuer les relevés à distance facilitera la gestion et la maintenance du réseau tout en réduisant le nombre des interventions des techniciens et donc le coût des opérations.
Mais le consommateur bénéficiera aussi de la possibilité de calculer avec précision les factures d’électricité sur la base des consommations réelles (et non sur des estimations). Surtout, il pourra réaliser des économies importantes grâce aux informations précises collectées par le compteur. Quant au gestionnaire du réseau de distribution, il pourra grâce à Linky assurer un équilibre satisfaisant tout en intégrant des sources de production décentralisées et intermittentes, comme les énergies renouvelables et la micro-production. Ainsi, avec ce nouveau compteur intelligent, notre pays joue une carte maîtresse pour le rapprochement entre pays européens autour de la question énergétique et contribue de façon concrète et efficace à la transition énergétique dont notre planète a tant besoin.
Crédits photo : Cisco Flickr